MUJIRUSHI – LE SIGNE DES RÊVES, C'EST BON SANS FAÇON.

De passage à la Fnac, ce jeudi, j'en ai profité pour jeter un œil à l'édition française (pardon frâââânçaise) du premier volume du Signe des rêves qui vient de sortir.
Comme j'en parlais ici, l'action se passant entre la France et le Japon, avec des interlocuteurs des deux pays, la question de la communication, et de la traduction reste un sujet délicat à traiter dans l'histoire. 


L'adaptation, signée Ilan NGUYÊN, donne au personnage du Directeur, exactement le ton pédant qu'il faut au personnage.
Le personnage ne dit jamais フランス en VO (furansu, la France) mais おフランス, en ajoutant le préfixe honorifique  devant le nom du pays. Cette subtilité est ici parfaitement transcrite par une déformation graphique en allongeant le "a" du mot, et donner des mots "frââânçais"...
Ce qui évoque de suite l'accent des vieilles pub avec ce qu'il faut de fierté patriotique déplacée pour le personnage. 


Le personnage termine aussi systématiquement ses phrases en japonais par ざんす (zansu). Ici, ce côté est rendu en substituant ce faux verbe par des "pardi" ou des "sans façon", tout aussi aléatoires, tout en étant moins systématiques. 
La répétition de ce genre de mécanismes passe toujours moins bien en français.
De même, les chapitres en japonais étaient numérotés en tant que 1er Sheey, etc.
Ils deviennent ici des "Sheey-pitre" du meilleur goût.


Malheureusement, dans d'autre cas, on ne peut pas faire de magie non plus... Ainsi, dans l'extrait ci-dessus, le Directeur ne corrige plus Kasumi du japonais vers le français, mais seulement sur son niveau de langage, même si le gag de la petite fille qui répète "sans façon" sans comprendre, marche tout de même
En français, il sera demandé plus souvent de faire recours à ce que j'appelais "la suspension volontaire de l'incrédulité linguistique" dans le billet précédent, le français venant effacer le japonais et le décalage entre les deux langues.
Ainsi quand les héros arrivent à Paris, et qu'ils découvrent que le jeune pompier, et dans une moindre mesure sa grand mère, qui les ont recueillis parlent japonais, l'effet est moindre.
Tout l'échange se déroule en français dans les bulles pour le lecteur (mais en japonais pour les personnages), mais à un certain moment la petite fille dit à la vieille dame : "Eh mais vous parlez japonais, en fait ?" et celle-ci de répondre (en français) : "Eh oui, un peu !".
Dommage de perdre un peu ce genre d'effet, mais c'était prévisible et il n'y avait pas beaucoup de marge de manœuvre.
Dans le second volume, il sera intéressant aussi de voir quels choix seront faits sur certaines scènes délicates à ce niveau.
  

Mujirushi – Le signe des rêves
© 2018 Naoki URASAWA/N WOOD Studio
Édité au Japon par Shôgakukan

Édité en France par Futuropolis et le musée du Louvre
Parution le 23 août pour le tome 1
Prix : 20 €

Tome 2 à paraître le 11 octobre 2018
144 pages en noir et blanc, et en couleur pour chacun des 2 tomes





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